TEST – Deadly Premonition 2 dans la lignée du premier

Deadly Premonition 2: A Blessing in Disguise signe le retour d’une franchise qui divise mais dont l’écriture marque toujours le joueur. Voyons si ce second opus gomme les défauts du premier tout en maintenant ses qualités.

Développeur : TobyFOX
Éditeur : Rising Star
Genre : Action Aventure
Prix : 49,99 €
Version pour le test : Nintendo Switch Exclu
Date de sortie : 10 juillet 2020

Deadly Premonition 2 attirera forcément l’attention des fans du premier opus qui n’a pas laissé indemne le public. Il existe clairement deux écoles qui sont nées suite à sa sortie en 2010. On retrouve les amoureux du soft qui se souviennent d’une expérience inoubliable, d’un scénario dont les ficelles sont tenues d’une main de maître. Les autres retiennent surtout ses limites graphiques dignes d’une PlayStation 2, ses failles techniques pour un sentiment d’avoir vécu une purge. Sortez à nouveau les fanions et préparez la bagarre. Une nouvelle fois, le titre divisera car on retrouve de belles qualités mais également une réalisation d’un autre temps en matière d’esthétisme et de rythme.

Une double enquête captivante

Pour Deadly Premonition 2, on réalise que l’on assiste à une double narration pour un seul événement. D’un côté, on suit deux enquêteurs du FBI en 2019, Aaliyah Davis et Simon Jones, qui interrogent longuement un vieil homme qui n’est pas commun. Très vite, on enfile la tenue d’un autre enquêteur bien connu, on incarne alors Francis York Morgan en 2005, le héros du premier opus. On se retrouve alors bien souvent en Louisiane dans le bled paumé de Le Carré.

On ne vous spoile pas alors énormément si on vous dit que les deux agents du FBI de 2019 ré-ouvrent l’affaire que nous découvrons en 2005. Nous allons donc la revivre en incarnant directement l’enquêteur. Que s’est-il donc passé ? C’est à nous de le découvrir pas à pas… et les pas seront nombreux et ils ne seront pas pressés.

Deadly Premonition 2

Nous avons un début de réponse lorsque nous arrivons à Le Carré. Si un agent s’y déplace, c’est qu’un crime a été commis. C’est une succession de meurtres qui frappe cette ville qui semble pourtant bien calme. C’est dans ce contexte que l’on intervient et que débute notre aventure hors du commun.

Une ambiance unique portée par ses acteurs

Le studio s’attarde longuement sur ses personnages, qu’ils soient secondaires ou de premier plan. Cela se traduit par des grandes lignes de dialogue et un gros plan sur chaque nouveau personnage dont le nom apparaît en gros plan. Ce qui est fort plaisant, cela demeure cette impression qu’ils semblent tous avoir un rôle à jouer dans l’histoire ou dans la progression du personnage principal. De même, ce ne sont pas des coquilles vides. Ils font tous preuve de caractère, ils possèdent tous leur tempérament et ne sont pas mis de côté.

Cela explique que de longues conversations sont entamées avec, tous aiment raconter des anecdotes et autres choses dont on se serait bien passé d’un côté. Et c’est ce qui peut déranger notre progression vis à vis de l’enquête. On aimerait découvrir des indices, avancer dans l’histoire mais nous sommes promenés d’un personnage à un autre sans que le dialogue aille droit au but. Alors, certains PNJ nous offrent des quêtes secondaires ou des tâches à réaliser qui ne sont guère passionnantes mais qui participent à l’élaboration du décor de la ville.

Deadly Premonition 2

Ailleurs, on se dit que le boulot a été réalisé brillamment. Les séquences d’interrogatoire en première ligne. Les développeurs se sont attardés sur les réparties et les manières de rebondir. Certes, c’est un peu dirigiste car les indices et les objets intéressants sont affichés à l’écran mais on ne s’attend jamais à la suite de la conversation. Pour le coup, c’est ô combien captivant et immersif. C’est alors tout au long du jeu que l’on pourra se délecter de quelques réparties et dialogues bien inspirés. Malheureusement, on subit bien trop d’autres dialogues de seconde zone qui perdent de l’intérêt à force de les accumuler. On voudrait souvent avancer dans notre enquête et simplement dans l’histoire mais nous sommes forcés de progresser au ralenti. Là où les titres actuels tentent les scénarios cinéma rapides et rythmés avec une durée de vie limitée, Deadly Premonition 2 se place aux antipodes et prend le temps d’installer son décor, ses personnages, son histoire.

À côté de cela, Francis York Morgan, le personnage principal de l’enquête de 2005, est clairement un protagoniste unique en son genre. Déjà dans le premier, son excentricité a été remarquée. Attendez-vous à voir ce trait de personnalité revenir à de très nombreuses reprises. Il parle beaucoup, je dirais même plus, il se parle énormément à lui-même qu’il en devient parfois exaspérant. Pas sûr d’avoir écouté et lu (on reste sur de la VOSTFR) toutes ses élocutions. Malgré tout, il reste un héros haut en couleurs que l’on aime revoir, qui reste intéressant à chaque fois qu’il confronte un nouveau personnage ou son allié, la jeune fille du shérif, Patricia Woods. D’ailleurs ils forment un duo plutôt inédit et qui fonctionne, ce qui est très difficile quand on pense à la personnalité difficile de York. Mais la jeune fille a du peps et de la personnalité, elle rentre souvent dans le lard de l’agent et ce n’est pas désagréable de la voir s’en plaindre.

Deadly Premonition 2

Mais ce n’est pas suffisant pour camoufler des sessions sans trop d’intérêt dans une ville modélisée façon PS2 que l’on explore en mode open-world.

Une ville naturellement pénible

Le rythme de l’aventure proposée par Deadly Premonition 2 est en dents de scie, et le plus souvent en bas de la pente. Il faudra un gros temps d’acceptation (et donc d’acclimatation) notamment lors du premier chapitre. Accepter que le rythme n’est pas frénétique et qu’il concorde d’une certaine façon avec des conditions réelles. On vous promène aux différents endroits de la ville et cela implique des tâches pas très entraînantes. Aller chercher une boîte de conserve dans un distributeur ? Acheter une babiole dans un magasin d’artéfacts plus fake qu’autre chose tout ça pour convaincre une vieille dame de quitter une piste de bowling ?

Le souci principal, ce ne sont pas en soi ces quêtes anodines mais le temps que l’on y investit. Ce ne sont pas des séquences qui durent 5 minutes mais minimum 15 ou 20. Consacrer autant de temps à une petite mission que l’on trouve sans intérêt est forcément désagréable. Puis, le jeu signe le retour des cycles jour et nuit contraignants. J’entends par là que vous ne pourrez lancer certaines missions qu’à 21h30 alors que vous la débloquez à 10h du matin, d’autres de 7h à 9h… alors que vous dépassez de peu le créneau. Certes, vous pourrez rouler une clope pour passer le temps ou aller dormir pour l’accélérer d’une bien belle façon, le faire de façon systématique n’est pas encore une habitude que l’on aime se coltiner.

Deadly Premonition 2

Alors on appréciera l’originalité des virées en skate-board (vite fait mais la voiture étant mal gérée dans le 1er jeu…), les mini-jeux aux récompenses plutôt loufoques, la visée simpliste mais pas dégueulasse et une mise en scène originale. À côté de cela, on pourra toujours regretter qui se situe dans la lignée de la première du côté technique et graphique. Visuellement vous saignerez peut-être des yeux à de nombreuses reprises, c’est comme si le développeur en charge était resté enfermé deux décennies plus tôt. Cela posera sans doute des problèmes à certains joueurs. On peut citer de nombreux exemples qui sautent aux yeux, les baisses de framerate et cie.

Néanmoins, lorsque cette première étape est passée, que vous avez préparé vos pansements pour chaque virée dans la ville, il est ensuite facile de s’y accoutumer et de suivre le scénario, à condition de ne pas être réticent quant à son rythme. Car on peut le dire, l’histoire et ses rebondissements valent le détour. Au final, c’est ce sentiment étrange qui est formidable lorsque l’on joue à Deadly Premonition 2. Celui qui nous invite naturellement à y retourner malgré tous les défauts énoncés plus tôt. L’ambiance, les personnages, le scénario font que l’on a envie d’y voir le bout. Je ne vous cache pas que c’est difficile de poursuivre tellement le jeu ne nous fait pas de cadeau. Mais le parti pris des développeurs est clair. On mise tout sur l’écriture des personnages et le scénario, l’ambiance autour.

Deadly Premonition 2

Deadly Premonition 2 restera donc clivant pour la communauté des joueurs. Un rythme en dents de scie, une technique très en deçà des standards et des graphismes dignes de la génération PS2 pourraient en rebuter plus d’un. Néanmoins, ceux qui ont adoré le premier opus ne pourront que s’y retrouver et aimer l’atmosphère du jeu, ses personnages qui ont du tempérament et une intrigue de qualité. Si vous vous savez tolérant quant à ses lacunes, si de votre côté, l’écriture surpasse le reste, alors cette suite sera certainement appréciée. Au contraire, si vous avez besoin d’un soft techniquement à la page et de graphismes dignes de notre époque pour que vous puissiez y plonger, alors éloignez-vous en. Deadly Premonition n’est pas destiné à tous les publics. Ce qui est certain, c’est qu’il marquera tout joueur qui ira au bout de l’expérience. Il reste simplement unique en son genre.

 

Points forts

  • Des personnages très bien écrits
  • Un duo qui fonctionne étrangement bien
  • Un scénario captivant dans ses grandes lignes...
  • Une enquête aux rebondissements inattendus

Points faibles

  • Techniquement d'une autre décennie
  • Des graphismes aussi d'un autre âge
  • ... mais un rythme en dents de scie
  • Des quêtes sans intérêt
6

Fair

Toujours dans la magique potion du jeu vidéo !

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