TEST – Octopath Traveler, un beau mais silencieux voyage

Octopath Traveler Switch SteamOctopath Traveler, initialement sorti sur Nintendo Switch, vient de rejoindre le rang des nombreux RPG créés/édités par Square Enix et portés sur PC via Steam. Et comme deux avis valent mieux qu’un, cette sortie sur le magasin de Valve est l’occasion parfaite pour vous proposer un second point de vue sur ce jeu singulier qu’est Octopath Traveler. Après notre premier test sur Switch réalisé par l’ami Sloth, c’est désormais Søren qui s’y colle pour une seconde critique qui se veut complémentaire.

• Genre : J-RPG (combats en tour par tour)
• Développeur / éditeur : Acquire & Square Enix / Square Enix
Support de test : PC (AMD Ryzen 5 2600X – Nvidia GTX 1060 6Go VRAM – 16Go RAM – HDD)
• Version du jeu utilisée : version Steam (fournie par l’éditeur)
• Disponible sur : Switch, PC

 

Un écrin d’une grande beauté…

Au premier regard, Octopath Traveler sait comment charmer. Sa direction artistique, d’une grand élégance, est clairement la première chose que l’on remarque lorsqu’on s’y essaie. Et pour dire les choses franchement, Octopath Traveler est d’une beauté à se cogner le cul par terre. La bande-son qui accompagne le titre, quant à elle, rend hommage à ces merveilleux J-RPG qui ont fait la beauté de nos vertes années, avec des thèmes qui réussissent à accompagner les séquences de jeu et à rester en tête sans pour autant devenir obsédantes.

Visuellement, le subtil mélange entre la 2D old-school et la 3D fixe de l’environnement est une véritable réussite. Ce mélange des genres et des époques s’apprécie également dans l’apparence de certains éléments du décor, à l’image de ces plans d’eau animés de façon moderne qui côtoient avec un naturel désarmant les gros pixels old-school des personnages ou des plaines herbeuses. Graphiquement, Octopath Traveler est d’une beauté saisissante, le genre à charmer son public en exposant à peine quelques captures d’écran.

D’ailleurs, les premières heures de jeu ne rompent pas le charme. Dès le départ, Octopath Traveler nous présente brièvement ses 8 personnages, tous différents de par leurs métiers et leurs aspirations, et parmi lesquels nous devons choisir le premier ou la première qui aura pour tâche de rassembler le groupe. Pour ce test, nous avons choisi le grand et fier Olberic, ancien chevalier de son état, qui s’est installé dans un petit village reculé après avoir été trahi il y a quelques années, ce qui a eu pour conséquence la mort de son roi et la chute de son royaume.

L’introduction est assez rapide, avec un flashback suivi de quelques scénettes « tranches de vie » qui débouchent sur la première intrigue prenant la forme d’un groupe de brigands menaçant le paisible village. Un trajet jusqu’à leur repère plus tard, un combat de boss s’enclenche et la suite signe le départ d’Olberic vers un voyage qui le mènera vers les réponses et la vengeance qu’il attend depuis longtemps. Le jeu nous encourage ensuite à recruter les 7 autres protagonistes avant de poursuivre la quête personnelle de l’ancien chevalier (le niveau recommandé de cette dernière dissuade d’en faire autrement), et c’est à ce moment précis que le véritable visage d’Octopath Traveler se révèle.

…qui renferme hélas un joyau un peu terne…

En fonction de la proximité de votre premier personnage avec les autres, l’ordre de recrutement diffèrera, mais notons que le niveau de difficulté minimal requis pour les phases de recrutement s’adapte au vôtre, ce qui vous permet d’être à peu près libres dans l’ordre que vous souhaitez adopter, ce qui est spécialement utile si vous voulez équilibrer votre partie assez tôt ou jeter votre dévolu sur un personnage qui vous aura fait de l’œil.

Hélas, chaque phase de recrutement adopte le même schéma « trajet jusqu’à un village – rencontre – flashback qui met en place les aspirations du personnage – quête avec boss – départ du village », ce qui devient vite assez rébarbatif lorsqu’il s’agit d’aligner 8 personnages de cette manière sans l’existence de réelles quêtes annexes entre deux recrutements pour casser le rythme. Mais il est facile de penser que cette redondance dans la narration pourrait être compensée avec des histoires de personnages intéressantes ou complexes. Or, à part quelques protagonistes vaguement charismatiques et une ou deux intrigues un peu plus matures que les autres, Octopath Traveler peine à proposer des origin stories dignes d’intérêt.

Pour autant, proposer des histoires avec peu de relief n’est pas un défaut en soi dans le genre du J-RPG dont le scénario se repose souvent sur la dynamique entre les protagonistes et leur combat contre un destin implacable. Hélas, là encore, Octopath Traveler botte en touche avec un groupe de 8 personnages qui communiquent finalement très peu. On se retrouve alors à regrouper des personnages mus par une quête personnelle mais qui n’affichent aucun réel lien affectif envers les autres membres de la bande. On en vient finalement à se demander pourquoi ces personnages voyagent ensemble, si ce n’est pour profiter du côté pratique de la chose. Cependant, des mini-quêtes secondaires existent, débloquées après l’étape de recrutement dans un village. Celles-ci manquent souvent d’épaisseur et se résument souvent à parler à un PNJ et à trouver le bon moyen de l’aider avec la bonne compétence, ce qui est loin de remonter le niveau en terme d’intérêt scénaristique.

Octopath Traveler Switch Steam Acquire Square Enix

…mais solide malgré tout

Toutefois, Octopath Traveler saura séduire les plus acharnés des fans de J-RPG. Ses mécaniques de jeu sont solides, et le système de combat s’avère extrêmement plaisant à manipuler. Celui-ci attribue une valeur de défense et un certain nombre de faiblesses à chaque ennemi, et le joueur doit alors découvrir la nature desdites faiblesses (un type d’arme ou de magie) afin que les coups portés puissent entamer la valeur de défense en question. Une fois celle-ci brisée, il est alors possible d’enchaîner des coups plus puissants. Cet aspect stratégique à la fois simple à prendre en main et rudement efficace se combine d’ailleurs à merveille avec le système d’accumulation des coups qui permet à chaque personnage de remplir une jauge à plusieurs cran. Chaque cran accumulé permet ensuite au personnage concerné d’obtenir des coups supplémentaires avec son attaque de base. Stratégiquement, ce système est très pertinent, car il permet soit de garder des coups en réserve pour tous les envoyer d’un coup sur un ennemi une fois sa défense tombée, ou au contraire de les utiliser pour réduire la valeur de défense ennemie de plusieurs niveau en une seule attaque, ce qui s’avère pratique lorsque votre groupe est doté de peu d’armes et d’attaques magiques correspondant aux faiblesses de l’adversaire.

A cela, rajoutons que le jeu fait preuve d’une grande fluidité dans l’enchaînement de ses combats aléatoires. Contrairement à certaines productions qui alourdissent les rencontres avec des introductions longues et impossibles à raccourcir d’une touche, Octopath Traveler se contente d’une écran de transition qui place le joueur directement dans le combat. La fin ne s’encombre pas non de fioritures inutiles et se contente d’afficher l’xp et la progression des personnages. Sans pour autant renvoyer une impression de minimalisme exacerbé, Octopath Traveler permet ici d’alléger l’expérience utilisateur en allant à l’essentiel dans la gestion de ce qui ponctue tout de même la majeure partie d’un jeu de ce genre.

Au chapitre des bonnes idées, on notera également la présence de compétences hors-combats, chaque protagoniste du groupe en possédant une qui lui est propre. Ces techniques permettent d’interagir avec une bonne partie des PNJ du jeu de différentes manières, et de façon plus ou moins intéressante selon celles-ci. Parmi les plus drôles figure celle d’Olberic qui peut demander la bonne moitié des PNJ en duel, ce qui entraîne des situations totalement décalées (il est possible de demander un curé en duel alors que celui-ci est en pleine messe, ou encore le soixantenaire à l’entrée du village). Parmi les plus pratiques, la marchande s’illustre avec la possibilité d’acheter des objets aux PNJ à des prix avantageux ainsi que de ramasser de l’argent au sol. La technique de l’érudit est également appréciable, celle-ci permettant d’interroger lesdits PNJ et de glaner des informations dans le but de révéler des objets cachés ou d’accomplir des quêtes secondaires. Enfin, nous avons également apprécié la possibilité qu’a la danseuse de recruter des PNJ pour les faire combattre avec le groupe (un nombre de fois limité), ce qui nous a permis de recruter une vieille dame à la force surhumaine capable de plier le boss d’après en deux attaques.

Pour finir, il important de noter qu’Octopath Traveler semble avoir été pensé pour de courtes sessions, ce qui permet effectivement de mieux gérer l’aspect répétitif et dirigiste du jeu, et de s’adapter au concept semi-nomade de la Switch pour lequel le jeu fut pensé à l’origine. Mais là encore, les fans de RPG old-school, habitués à enchaîner le longues heures de jeu devant leur Final Fantasy préféré et qui auront fait le choix de cette version Steam, risquent de peu apprécier cet encouragement aux courtes sessions.

Encart technique : sur le plan purement technique, cette version Steam d’Octopath Traveler ne diffère pas beaucoup de celle sortie sur Switch l’an dernier. La différence principale réside dans la résolution et le nombre d’images par seconde sur PC, qu’il est logiquement possible de pousser au-delà de ce que le jeu proposait sur la console de Nintendo. La qualité d’image est donc ici un peu plus fine et le gain en fluidité tapera dans l’œil du joueur averti. Si vous hésitez entre ces deux versions, il vous faudra donc déterminer si vous êtes à ce point tatillon sur le moindre gain de qualité visuelle ou si vous préférez la souplesse ergonomique offerte par le support hybride de la Switch.

 

Octopath Traveler n’est pas vraiment décevant, mais il échoue à proposer une expérience complète, nécessaire pour entrer dans les annales du RPG. Mais à défaut d’une histoire captivante, le J-RPG d’Acquire et Square Enix possède tout de même un gameplay solide qui satisfera les joueurs attirés en premier lieu par la possibilité d’optimiser des compétences de combat et de débloquer des jobs pour leurs personnages. Les autres, ceux qui choisissent avant tout leurs RPG dans le but de vivre les histoires qu’ils proposent, risquent vite de se lasser à cause de cet enchaînement indigeste de quêtes à la construction trop similaire. Octopath Traveler n’est donc pas un mauvais jeu, mais un jeu de niche destiné à une catégorie bien précise de joueurs. Ceux-ci pourront rajouter 1 point à ce test.

3.5 6 votes
Évaluation de l'article

Points forts

  • Le direction artistique somptueuse
  • Les compétences hors-combat
  • Le système de combat intuitif et satisfaisant
  • Le gameplay globalement bien fichu

Points faibles

  • Le scénario fade et fragmenté qui ne prend pas
  • L'absence de réelle dynamique entre les protagonistes
  • Le sentiment de répétitivité qui s'installe vite
7

Good

Co-fondateur de Try aGame, pinailleur en chef, et amateur de belles histoires. Vous pouvez me suivre sur Twitter et Mastodon
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Reissarud
Reissarud
3 années il y a

Je suis surpris par la qualité de ce test bien écrit et qui me parait objectif. Je ne connaissais pas votre site mais vous venez de gagner un lecteur 🙂
Merci pour cet article que j’ai pris plaisir à lire et qui a répondu à mes questions.

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