TEST – Baldur’s Gate 3 : quand le RPG gagne un niveau

Après environ 5 ans de développement et pas moins de 2 ans d’Early Access, Baldur’s Gate 3 est désormais disponible dans sa version commerciale, et le moins que l’on puisse dire, c’est que le contenu qu’il nous propose est d’une épaisseur remarquable. Jetons un œil au petit dernier de Larian, les géniteurs de la série Divinity, qui nous avaient déjà précédemment servi les deux excellents Divinity: Original Sin dans le même registre.

• Genre(s) : cRPG (RPG en point’n’click) avec règles inspirées du jeu de rôle Donjons & Dragons et combat en tour par tour.
• Développeur / éditeur : Larian.
• Support de test : PC (Nvidia RTX 2070, AMD Ryzen 7 5700X, 32 Go RAM et SSD pour un réglage en ultra + 1080p).
• Disponible sur : PC (des versions consoles sont également prévues mais non-disponibles au moment de ce test).
• Version du jeu testée : clé Steam fournie par l’éditeur, jeu testé du day-one jusqu’au hotfix 4.
• Contexte & point de vue de cet article : l’auteur de ce test n’a pas joué aux deux premiers Baldur’s Gate, et a joué aux deux Divinity: Original Sin de Larian.

Baldur’s great

Il s’agit d’un critère purement subjectif et personnel, bien entendu, mais je considère que le créateur de personnages est souvent un bon aperçu de ce à quoi s’attendre dans un jeu de ce genre et dans les genres similaires. Le souci du détail, l’envie de proposer du choix au joueur, ou encore le temps qu’il est possible d’y perdre pour tester les combinaisons possibles à la recherche de l’avatar parfait qui nous donnera la première grande impulsion dans l’aventure qui s’annonce… tout cela donne le ton et participe à maintenir ou non, toute cette excitation accumulée avant la sortie du jeu. Je me souviens encore de Dragon Age Inquisition, que j’attendais avec une extrême impatience, mais dont le créateur de personnage avait quelque peu calmé mes ardeurs à cause d’une quantité de détails qui faisaient parfois l’impasse sur la qualité.

Dans Baldur’s Gate 3, le créateur de personnage est dérivé de celui de Divinity Original Sins 2, avec une certaine générosité dans les éléments de personnalisation, et le sentiment qu’il y a vraiment eu une réflexion apportée à ce que doit être cette étape de la partie du moins de vue utilisateur. Pas juste deux ou trois fonctionnalités de base bazardées ça et là pour faire plaisir au joueur. Et cela pose déjà d’emblée un premier aperçu du jeu fort encourageant : 7 personnages « origines » (= avec une histoire rattachée au fil principal) dont 1 personnalisable, pas moins de 11 races disponibles (sans parler des sous-races), 12 classes qu’il sera même possible de croiser librement, trois choix de genre (masculin, féminin, non-binaire), et entre 4 et 7 modèles de visage pour chaque race auxquels il est encore possible de rajouter des éléments de personnalisation. Et je ne vous parle pas du nombre de coiffures (sans restrictions de genre), de larges gammes de couleurs pour les yeux, la peau, etc. Les fans de RPG mangent vraiment bien, chez Larian.

On ne peut pas dire que Larian à faire

« Mais il ne va pas quand même pas passer tout son test à parler du créateur de personnage, le bougre ! », allez vous me dire, à deux doigts de fermer l’onglet d’un middle click rageur ; passons donc à la suite. Baldur’s Gate 3 se découpe en trois actes qui se déroulent sur une grande carte qu’il est généralement possible d’explorer librement, et qui cache parfois d’autres sous-cartes de bonne taille. Ces étendues à explorer sont rarement avares en contenus, entre les quêtes secondaires parfois rattachées au fil principal, les petits secrets à débusquer, des PNJ ou encore les escarmouches régulières qu’il est souvent possible d’aborder de plusieurs façons différentes – qu’il s’agisse de stratégies de combat (trouver la bonne position pour débuter l’affrontement, par exemple) ou de compétences à utiliser (persuasion ou intimidation pour calmer le jeu, par exemple). Notons d’ailleurs un fait appréciable : vous gagnez évidemment de l’xp en rossant vos adversaires, mais éviter le combat grâce à votre bagout ou en usant de votre autorité rapporte également de l’xp, ce qui permet de ne pas encourager les joueurs à privilégier le combat par défaut pour optimiser la montée en niveau au détriment du jeu de rôle.

Côté contenu, on en a pour notre argent et bien plus. Les quêtes sont nombreuses, tout comme leurs embranchements et les possibilités qui en découlent. L’exploration est souvent récompensée avec du matériel à utiliser ou à revendre, et l’immersion permise par la mise en scène de tout ce contenu est incroyablement réussie. On regrette juste que l’acte 3 pèche par excès de générosité avec un contenu trop dense avec un ensemble aussi compréhensible qu’un sac de nœuds. Par exemple, le jeu semble nous pousser avec insistance vers les objectifs de la quête principale dès le début de l’acte 3, et les esquiver pour s’intéresser aux quêtes secondaires nécessite parfois de gros efforts pour contourner le fil principal qui occupe le milieu du chemin comme un Ronflex sur la route 11. Un acte 3 qui se retrouve d’ailleurs à essuyer quelques bugs de quête précisément à cause de cette densité qui démultiplie les possibilités et les ordres de résolution (pour info, cela dit, des patchs sont en cours de déploiement et Larian a clairement annoncé prendre en compte les remontées des joueurs à ce sujet).

Se rajoute ensuite un système de classes très varié et fortement inspiré du jeu de rôle Donjons & Dragons, adapté et équilibré pour le support jeu vidéo. On est ici loin des Pathfinder (Kingmaker & Wrath of the Righteous), certes excellents sous de nombreux aspects, mais qui voulaient à tout prix adapter fidèlement le livret de règles du jeu de rôle éponyme au point d’en être absolument imbuvables. Baldur’s Gate 3, de son côté, réduit la progression des personnages à 12 niveaux, ainsi que l’éventail de compétences des classes pour ne retenir que celles jugées pertinentes. Le compromis proposé par Larian nous paraît ici assez pertinent et équilibré, étoffé sans pour autant nous étouffer. Cela dit, on aurait quand même apprécié un plafond de niveau réglé à 14 ou 15, le niveau 12 étant aisément atteint en début ou milieu d’acte 3. Incidemment, le multi-classing (le croisement de classes pour un seul personnage) se voit un peu limité en intérêt.

Lootons et rageons

Au-delà des qualités et de la taille du contenu, Baldur’s Gate 3 s’illustre aussi par son sens du détail. Même si certaines animations (en cours de correction, au vu des derniers patch notes) sont parfois perfectibles, difficile de ne pas remarquer l’usage attentionné de la motion capture pour rendre les dialogues plus vibrants et plus vivants. Autant le personnage principal semble parfois se mouvoir étrangement, autant les PNJ gagnent en vie et en personnalité grâce à ces animations corporelles de qualité qui facilitent l’immersion du joueur. Certaines têtes de studios qui se gargarisent un peu trop facilement de créer des jeux immersifs pourraient en prendre humblement de la graine. Même remarque avec les doublages (uniquement en anglais, par contre) qui sont d’une qualité rare. On constate ici le même effet que l’on constate dans certains animes japonais : même sans comprendre la langue, les voix et les intonations seules permettent d’appuyer la profondeur et le caractère d’un personnage. Ça vous donne le niveau le doublage.

L’interface, par contre, se heurte aux défauts habituels des jeux du genre. On se retrouve en effet avec des grilles d’inventaires rapidement surchargées (malgré l’idée pertinente des sous-contenants pour regrouper certains types d’items), et c’est assez régulièrement qu’on se retrouve à devoir faire du tri en gardant souvent de l’inutile sur soi dans l’éventualité que cela soit utile plus tard. C’est d’ailleurs un point négatif du loot : certains objets ne sont pas toujours identifiés comme pouvant être revendus sans risque, et on se retrouve par exemple à empiler les lingots dans le coffre du campement en pensant que cela sera utile pour une forge ou un système de craft éventuellement disponibles plus tard au cours de l’aventure… alors qu’ils ne servent finalement qu’à être revendus à bon prix. Entre ça et les fenêtres volantes dont les positions ne sont pas gardées en mémoire ou qui ne peuvent pas toujours être redimensionnées, on se retrouve avec une interface utilisateur un peu datée et rigide.

Mais le plus gros point noir de cette interface est sûrement cette impossibilité incompréhensible de gérer l’inventaire des compagnons qui ne sont pas présents dans l’équipe… Vous voulez récupérer cette épée confiée à Lae’zel pour la donner à Karlach ? Il faudra demander à un compagnon de quitter l’équipe, puis demander à Lae’zel de la rejoindre, récupérer l’épée, demander à Lae’zel de quitter l’équipe, et redemander à votre compagnon de revenir, en faisant à chaque fois des allers et retours dans un campement trop grand et dans lequel les personnages sont parfois éloignés les uns des autres. Le même problème se pose si vous souhaitez gérer les montées en niveau de chacun, puisque vous n’avez accès qu’au profil des quatre personnages présents dans votre équipe.

Baldur’s Gate 3 se hisse sans conteste parmi les meilleurs titres de 2023. Riche, équilibré et incroyablement immersif, le dernier jeu de Larian est un incontournable pour tout fan du genre, et il en sera certainement l’une des références pour les années à venir. On lui reprochera malgré tout une ambition un peu sauvage qui le pousse parfois à en faire un peu trop, comme en atteste cet intéressant mais indigeste acte 3, ainsi qu’un léger manque de finitions au niveau de l’interface de jeu. Au-delà de ça, Baldur’s Gate 3 nous montre ce qu’est un jeu patiemment construit, pensé pour ses joueurs, et capable de se vendre seulement avec la solidité de son contenu sans se reposer sur quelques belles déclarations et la fidélité des fans pour tenir les délais du calendrier fiscal.

 

Des questions sur le jeu auxquelles nous n’aurions pas répondu ? Des fautes à signaler, ou un avis divergent à partager avec nous ? Vous pouvez réagir à ce test avec un commentaire ou sur les réseaux sociaux via Facebook / Twitter / Instagram, voire même vous abonner à notre compte curateur Steam afin de retrouver nos tests PC. Pour suivre nos inénarrables péripéties en direct ou en différé, sachez que nous sommes aussi de temps en temps sur Twitch !

N’hésitez pas non plus à aller vous promener sur notre site, pour y découvrir nos nos tests de jeux et autres dossiers, ainsi que divers avis au sujet de films ou de séries, ainsi que des guides et astuces pour vos jeux favoris. Et ce n’est pas fini : nous testons aussi plein de jeux de plateau !

0 0 votes
Évaluation de l'article

Points forts

  • Un scénario épais et à embranchements multiples
  • Des compagnons à la personnalité évolutive
  • L'adaptation équilibrée des règles de Donjons et Dragons
  • Visuellement superbe
  • Des classes variées et combinables
  • La présence du mode multijoueur

Points faibles

  • La limite au niveau 12, un peu courte
  • La caméra pas très satisfaisante dans les endroits exigus
  • La surprenante impossibilité de gérer l'inventaire de toute l'équipe sans devoir congédier/enrôler les compagnons à chaque fois...
9

Amazing

Co-fondateur de Try aGame, pinailleur en chef, et amateur de belles histoires.
S’abonner
Notifier de
guest
0 Commentaires
Inline Feedbacks
View all comments

Mot de passe oublié