Attendu depuis longtemps par les fans de la licence qui se pâmaient d’émotion devant la moindre annonce d’un nouveau grille-pain ou d’une nouvelle couleur de papier-peint pendant que d’autres prenaient leur mal en patience en dessinant des fanfics entre Marie et le Doom Slayer, Animal Crossing New Horizons débarque enfin sur Nintendo Switch. L’occasion parfaite pour l’auteur de ce test d’apprendre l’humilité alors qu’il se moquait (gentiment) des fans précédemment cités il y a moins de deux semaines, avant de devenir complètement gaga de sa cane de voisine nommée Ketchup. Un test réalisé en partenariat avec l’amicale de la pêche à la loche (« la loche d’étang, la loche qui détend » ™).
• Développeurs / éditeur : Nintendo
• Support de test : Nintendo Switch
• Disponible sur : Nintendo Switch
• Version du jeu utilisée : versions 1.0 à 1.1.3a, dématérialisée (eshop), fournie par l’éditeur
• Angle du test : découverte de la licence
C’est l’histoire d’un ver et d’un hameçon qui rentrent dans un bar
Animal Crossing New Horizons, c’est l’histoire d’un magnat de l’immobilier nommé Tom Nook qui vous propose un forfait pour fuir la civilisation et emménager sur une île déserte, tente et sac de couchage inclus. Si les premières escapades sur cette île vierge de tout contact humain (et animal) jusque là s’avèrent joyeuses et dépaysantes comme tout, vous cédez rapidement au chant du tanuki qui vous glisse à l’oreille que, finalement, avoir une vraie maison pour dormir, ça serait tout de même plus sympa. Et crac, à peine remboursé le prix du ticket aller, vous vous engagez sur un prêt. Le premier d’une longue lignée, les suivants vous attendant en embuscade au moindre petit besoin d’espace.
Grosso modo, Animal Crossing New Horizons est une sorte de fable emplie d’animaux mignons dont certains en ont après votre pognon. Du pognon pour agrandir votre maison, du pognon pour construire celle des autres, du pognon pour développer les infrastructures et du pognon pour lancer la boutique du coin dans laquelle vous dépenserez à nouveau du pognon. Et étrangement, on y prend plaisir et on en redemande. Le jeu de Nintendo ne cache à aucun moment la place prépondérante de l’argent au sein de sa progression, et même si on regrette parfois l’absence trop flagrante de second degré dans ce parti pris, on finit par se prendre au jeu. Précisons néanmoins qu’Animal Crossing New Horizons est un jeu auquel nous recommandons de jouer avec un minimum de sens de la dérision si le système décrit précédemment est du genre à vous coller de l’urticaire dans la vraie vie.
Les citrins de la SNCF
Animal Crossing New Horizons se place à mi-chemin entre un épisode des Sims et un Harvest Moon-like. Du premier, on retrouve les interactions sociales à développer avec ses voisins ainsi qu’une passion débordante pour la décoration d’intérieur et d’extérieur ; du second, on citera le crafting et la pêche aux ressources diverses qui constitueront une bonne moitié de votre expérience de jeu. Mais nuançons néanmoins ces comparaisons : point de champs à arroser ou à labourer dans Animal Crossing New Horizons ; et les animaux sont ici vos voisins. Et contrairement aux Sims, qui inclut des interactions sociales très complètes et un éventail d’émotions très large, Animal Crossing New Horizons propose une simulation de voisinage simple et bienveillante. Ce dernier mot résume d’ailleurs parfaitement l’expérience globale, cette bienveillance se retrouvant autant dans les relations avec vos voisins qui seront très rarement négatives (offrir un caillou à un résident est ici bien mieux perçu que dans Stardew Valley, par exemple) que dans l’absence de risque réel pour la santé de votre personnage tout au long de la partie (un KO en un coup par une des rares bestioles capables de vous attaquer n’occasionne aucun malus). Le but, ici, est de proposer aux joueurs une expérience totalement inoffensive, libre de toute déconvenue (ou presque, nous en parlons un peu plus bas), afin d’offrir un terrain de jeu calme et accessible à toutes celles et ceux qui chercheraient un oasis de quiétude au milieu d’autres mécanismes de jeu plus « traditionnels » disponibles sur le marché.
Fraîchement débarqué sur votre île, vous ne serez ainsi soumis à aucune forme de pression. L’ami Tom Nook vous confiera de temps à autres des tâches que vous pouvez reporter à la Saint-Glinglin, et rien ne vient vraiment vous pousser à accélérer la cadence. Bienveillant, donc, et tout en chill. Petit à petit, ces quelques missions vous demanderont de récupérer assez de ressources pour financer la construction de tel ou tel bâtiment-clé (musée, magasin…), tout en vous recommandant implicitement de développer votre maison pour en augmenter l’inventaire ainsi que l’espace disponible. A quoi cela sert-il, en effet, de placer un magasin ou une boutique de vêtements sur votre île si vous ne pouvez pas en devenir un consommateur régulier et digne de ce nom à cause d’une tente trop riquiqui…?
En dehors du développement des infrastructures de votre île, vous aurez donc la possibilité de faire de la déco et de jouer les Cristina Córdula insulaires. À ce sujet, Animal Crossing New Horizons est une véritable mine d’or que l’on creuse sans en voir les limites. Le nombre d’objets et de vêtements disponibles est gigantesque et décliné en plusieurs collections qui vous permettront de personnaliser votre île et votre Robinson volontaire selon vos goûts. Et pour collectionner tout ça, les moyens ne manqueront pas. Si vous pouvez effectivement acheter certaines choses en boutique moyennant clochettes sonnantes et trébuchantes, il est également possible de confectionner énormément d’éléments de déco (sous réserve de trouver les plans), de créer vos propres motifs en pixel art (applicables ensuite sur des vêtements et certains objets), de partir à la chasse aux ballons-cadeaux qui flottent régulièrement au-dessus de votre île, de collecter des fossiles pour le musée, de recevoir des cadeaux de la part de PNJ ou d’autres joueurs, ou encore de participer à certains évènements en fonction de la date. Bien que cette partie qui constitue la moitié de la recette de cet Animal Crossing New Horizons puisse paraître simpliste, la multiplicité des éléments de gameplay – en sus de la grande variété des objets qui réduit les chances de doublons pendant un bon bout de temps – permet de varier les plaisirs et d’éviter toute monotonie.
Valérie d’amiibo
L’aspect décoration d’Animal Crossing New Horizons ne s’arrête pas à votre maison ou à ses alentours. C’est carrément toute l’île, à terme, que vous pouvez personnaliser selon vos envies. Chaque maison que vous aidez à faire fleurir sur votre territoire peut être placé où vous le souhaitez, et ce qui l’entoure dépend totalement de votre imagination. Il est tout à fait possible de les aligner les unes à côté des autres ou de leur accorder des jardins délimités par des clôtures et décoré par des fleurs, des arbres ou des objets divers. Parlons d’ailleurs de la végétation, sur laquelle il est également possible d’influer. Les arbres peuvent être coupés pour ne laisser apparaître que leurs souches, mais peuvent aussi être déracinés pour être replantés ailleurs. A l’image des fleurs qui existent en plusieurs variétés, il est ainsi possible de disposer de ces éléments librement afin de créer les décors de vos envies, tout en lorgnant chez vos amis ou du côté des « îles mystères » (des îles vierges disponibles aléatoirement via l’aéroport) pour dégoter de nouvelles variétés fruitières ou florales.
En plus limité, le joueur a également la main sur les villageois qui viendront peupler son petit bout de paradis. Via les îles mystères sus-citées, et si des terrains sont disponibles à la vente, des PNJ peuvent être croisés et invités. Le camping, un des bâtiments à débloquer, est un autre moyen de rencontre afin de recruter régulièrement de nouveaux habitants. Mais si l’invitation est rendue aisée (certains PNJ s’incrustent d’ailleurs d’eux-mêmes sans vous demander votre avis si une parcelle est à la vente, que vous n’avez choisi personne pour l’occuper), faire déménager l’un de vos habitants s’avère plus compliqué. Ce qui peut être frustrant quand vous tirez le mauvais numéro et que vous obtenez un voisin peu satisfaisant sur le plan du chara-design et des interactions sociales. À ce sujet, les amiibos peuvent être de la partie au sens littéral de l’expression, une option déblocable au fil de la progression permettant de scanner l’un de vos amiibos Animal Crossing pour inviter le personnage associé dans votre camping. Les amiibos d’autres licences, quant à eux, n’apportent aucun bonus, contrairement à des jeux comme The Legend of Zelda Breath of The Wild qui permettait malgré tout d’obtenir quelques bonus mineurs avec des amiibos étrangers à sa propre licence.
Enfin, une forme de progression s’observe avec le déblocage à rythme lent mais constant de nouvelles fonctionnalités. Le Remod’île, par exemple, se débloque après la fin du fil de quêtes lié à Tom Nook. Les outils offerts par le Remod’île permettent de propulser la personnalisation de l’île à un tout autre niveau en offrant la possibilité de maroufler des chemins à textures diverses (motifs persos compris), voire d’influer sur le relief du terrain et les cours d’eau à l’intérieur de l’île. Alors que le générique du jeu tombe, celui-ci vous place ainsi dans les mains de quoi relancer l’attrait des heures de jeu qui vont suivre.
Une gestion d’inventaire à terre
Hélas, Animal Crossing New Horizons pèche là où on ne s’y attendait pas de la part d’un gros éditeur comme le sien : la gestion d’inventaire. À ce sujet, Animal Crossing New Horizons se place parmi ce qui se fait de moins pratique. D’entrée de jeu, la gestion du sac du/de la protagoniste vient briser la sérénité acquise par la très reposante ambiance du jeu. Au-delà de certains objets qui s’empilent et d’autres non (il est possible d’empiler des noix de coco par 10 mais de minuscules palourdes ne se stockent qu’à l’unité…), la gestion desdites piles est une véritable plaie. Si vous souhaitez, par exemple, séparer 10 unités de fer d’une pile de 30, aucune fonction ne permet de le faire en une fois, ni même de diviser la pile par deux pour vous faciliter la tâche. Dans ce cas précis, il vous faut retirer 1 par 1 chaque unité voulue de la pile… avant de les rassembler manuellement, là encore 1 par 1, sous réserve d’avoir assez de marge dans l’inventaire pour ce faire. On citera également l’atelier de bricolage qui vous permet tout au long du jeu de fabriquer outils, meubles et autres objets. Celui-ci vous force à fabriquer des objets un par un, avec la petite animation obligatoire entre chaque. Et celui-ci n’est évidemment pas lié à l’inventaire de votre maison. Il faut ainsi, Skyrim vanilla-style, aller piocher les bonnes ressources dans l’inventaire avant de vous placer à l’atelier, puis replacer les restes dans l’inventaire après ça…
Le crafting en devient assez rapidement redondant car celui-ci nous oblige à trouver des astuces pour qu’il devienne le moins pénible possible (mettre l’atelier dans la pièce principale de la baraque, par exemple, histoire d’avoir tout sous la main) et on se surprend à ne plus y faire appel aussi régulièrement qu’on le voudrait. À cause de ce système qui a mal été pensé en terme de simplicité d’usage, on en vient même parfois à acheter ses propres outils pendant les emplettes au magasin au lieu de les fabriquer soi-même quand l’argent coule un peu plus facilement. S’il est important de prendre en compte qu’Animal Crossing a très certainement été pensé pour forcer le joueur et la joueuse à prendre son temps et à ne pas observer un rythme de jeu soutenu, ce genre de détail relève toutefois de la mauvaise ergonomie de jeu, celui-ci créant une frustration devant des actions répétitives qui ne sont ni plaisantes ni relaxantes. On pourrait aussi citer le cas de la pêche, qui ne vous propose à aucun moment de relâcher la prise si celle-ci ne vous convient pas (option qui devient souhaitable quand on en vient à farmer un poisson rare), sauf au moment où votre inventaire est plein, ou si vous avez le courage de relâcher manuellement les poissons de votre sac un par un.
Au chapitre des points noirs, si on passera rapidement sur la précision parfois bancale de certaines actions opérées au niveau du sol (plantation, pose d’objets…), on citera surtout l’omniprésence de l’argent. Les sommes faramineuses demandées pour tout et n’importe quoi peuvent certes être considérées comme cohérentes avec un jeu qui mise sur une jouabilité étalée sur le long terme, mais celles-ci donneront à beaucoup de joueurs l’impression d’une progression artificiellement freinée digne de certains jeux free-to-play… ce qui est un comble pour un jeu à expérience complète. Fort heureusement, des astuces pour gagner plus d’argent existent, mais elles ont en commun la nécessité de passer par des mécaniques susceptibles de briser le fun d’une frange des joueurs. Entre le farm intensif de certaines bêbêtes qui rapportent ou le passage par l’enfer de la bourse aux navets (et l’ambiance tendue des échanges de bons plans via Discord ou autre plateforme communautaire extérieure au jeu), on s’éloigne peu à peu de cette ambiance relax promue par le jeu. On a parfois ainsi cette désagréable impression de s’échapper d’une vie qui serait paisible si elle n’était pas parasitée par les lois de l’argent pour entrer dans un monde virtuel paisible mais également parasité par les lois de l’argent.
Animal Crossing New Horizons excelle dans sa proposition d’un jeu calme et mignon capable d’offrir une véritable évasion du monde réel. Mais bien que le jeu demeure amusant et d’excellente facture, on déplore une ergonomie d’inventaire totalement aux fraises, ainsi qu’un système économique ingame un peu trop inspiré du réel. C’est dommage, car Animal Crossing New Horizons est un concept bienvenu. Un concept nécessaire, même, dans le contexte difficile au sein duquel ce test a été rédigé. Mais surtout, un concept qui a réussi un tour de force : celui de rameuter un éventail de joueurs plus large que prévu. Si notre expérience a été très satisfaisante dans l’ensemble, on regrette toutefois qu’Animal Crossing New Horizons soit entaché par des défauts certes rares mais suffisamment pénibles pour que ceux-ci pèsent de façon importante sur l’expérience de jeu.
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