Au sommet de son art ?
Éditeur : DON’T NOD
Genre : Aventure/Plateforme
Support de test : PC (version fournie par l’éditeur)
Date de sortie : 31 octobre 2023
Le studio français DON’T NOD a acquis une grande notoriété pour ses jeux narratifs, avec pour étendard la célèbre licence Life Is Strange. Prochainement, les développeurs ont pourtant choisi d’opérer une transition de genre. Avant Banishers: Ghosts of New Eden, une incursion dans un mix action et RPG, le studio nous offre Jusant, un jeu de plateforme où la narration se fait même très discrète. Alors comment cette nouvelle voie se présent-elle ? S’agit-il d’un sentier prometteur ou d’un dévissage en haute altitude ? C’est ce que je vais vous raconter dans les prochaines lignes de ce test.
On s’était dit rendez-vous dans Jusant
Peut-être l’ignorez-vous, mais « Jusant » est un mot français. Il s’agit d’un terme maritime qui désigne la période où la marée est descendante, un reflux en somme. Pourtant, le jeu « Jusant » repose sur un concept éloigné : l’ascension d’une immense montagne. À première vue, le lien ne semble donc pas évident, mais rassurez-vous, vous le comprendrez en grimpant.
Tout ce que je peux vous dire, c’est que l’aventure de Jusant débute lorsque qu’un jeune garçon se présente au pied de cette immense montagne, déterminé à la gravir. Très vite, on découvrira qu’il trimballe dans son sac une petite créature bleue qui va l’aider dans son ascension du pic. Une introduction scénaristique abrupte et comme je le disais en début de test, une narration aux traits fins. Le titre de DON’T NOD offre en effet une expérience qui se vit plus qu’elle ne se raconte. Il suit le même principe que des jeux tels que Journey ou plus récemment Stray.
Pour mieux appréhender le contexte de Jusant, il sera alors essentiel de se consacrer à la chasse aux collectibles. En effet, de petites lettres, entre autres éléments, sont disséminées un peu partout sur la montagne. La lecture de ces lettres détaille en grande partie l’univers du jeu. Pas de dialogues, pas de mots, seulement quelques onomatopées. Voilà tout ce que le personnage principal nous servira. À tel point que les joueurs réfractaires aux collectibles pourraient bien terminer l’aventure en se demandant presque pourquoi ils ont entrepris cette ascension.
Alors dans ce genre de jeux, où personne ne parle, la musique a, en revanche, un rôle crucial à jouer. C’est elle qui doit transmettre aux joueurs l’atmosphère du moment. Sur ce point, Jusant s’en tire plutôt bien. Les pistes musicales sont belles et parviennent à évoquer les émotions appropriées. Si bien que j’ai failli chipoter sur la parcimonie avec laquelle elles sont utilisées. Il est vrai que l’équilibre est délicat à trouver. Trop de musique risquerait de les rendre insignifiantes, mais en mettre trop peu pourrait ôter toute poésie à l’aventure. En fin de compte, je pense que l’équilibre est correctement calibré. L’aspect sonore est appréciable dans son ensemble, surtout lorsque l’on considère en plus les divers bruitages de l’environnement montagneux. Le sifflement du vent entre les parois, le bruit des pitons plantés dans la roche…
Sur le plan visuel, Jusant fait également un excellent travail. Le chara-design et le style visuel sont convaincants. Les environnements sont bien conçus et offrent de la variété, ce qui constituait d’ailleurs ma principale préoccupation au début de l’ascension. Heureusement, on passe d’un flan de montagne rocailleux, à des parois plus luxuriantes, tout ça en traversant des cavernes. Ouf. Du point de vue technique, Jusant se situe dans la moyenne en termes de qualité graphique. Sur PC, avec les paramètres graphiques réglés sur « Élevée », le rendu est plus que satisfaisant. La distance de vue est raisonnable, les textures restent nettes, et le niveau de détail est tout à fait adéquat. Le jeu est également très fluide et je n’ai eu droit qu’à un plantage sur PC. Dans l’ensemble, il n’y a pas grand-chose à redire sur la partie technique.
La petite bête qui monte, qui monte
Et maintenant, parlons du gameplay. Comme vous l’avez sans doute compris à présent, Jusant se concentre sur l’escalade, et ses commandes sont adaptées en conséquence. Contrairement à 99 % des jeux, il ne suffit pas de se coller à la paroi et de maintenir simplement la flèche du haut enfoncée pour monter. Non, ici, nous contrôlons indépendamment les deux mains de notre héros grâce à la pression des gâchettes de la manette. D’ailleurs, permettez-moi de le dire d’emblée aux joueurs PC, Jusant est clairement conçu pour être joué à la manette.
En tout cas, le principe est assez simple à comprendre. Maintenez la gâchette droite enfoncée, et le personnage accrochera sa main droite à la paroi. Relâchez la gâchette, et il lâchera prise. Le même système s’applique à la main gauche. Évidemment, si vous relâchez la pression sur les deux gâchettes simultanément, c’est la chute assurée. Cela nécessite donc une certaine gymnastique digitale, et je peux vous garantir qu’à certains moments stressants, vous allez serrer la manette bien fort. Ce gameplay à la manette crée véritablement une sensation d’immersion.
Après avoir accroché la paroi, il est essentiel de bien diriger notre personnage. Le joystick permet d’orienter la main libre vers la prise que que l’on souhaite atteindre. Comme dans la réalité, il est crucial de tendre la main la plus proche de la prise visée, plutôt que la main opposée, faute de quoi on risque de ne pas avoir assez d’allonge pour agripper la prise. Le plus difficile dans tout cela est de coordonner efficacement la pression des touches lorsqu’on se rend compte que la mauvaise main tente d’attraper la prise suivante. Une simple question de concentration, mais suspendu dans le vide, il en va toujours de votre survie.
Bien que, dans les faits, le jeu est très indulgent en ce qui concerne les chutes, car notre héros ne risque pas la mort même après des dégringolades qui seraient fatales pour n’importe qui. Ce qui en fait retire un peu au stress des hauteurs. La seule jauge à laquelle il faut réellement prêter attention est celle de l’endurance. En effet, notre grimpeur use ses petits bras à force de se hisser de prise en prise. Heureusement, il peut, tout en restant accroché à la paroi, se dégourdir un peu pour regagner de l’endurance. Cependant, il faut rester vigilant, car l’endurance maximale diminue progressivement et ne retrouve son niveau d’origine que lorsque notre protagoniste pose les pieds sur un sol horizontal. Il ne faut donc pas trop s’attarder en chemin sous peine de devoir repartir de votre dernier checkpoint.
Pas de prises de tête, juste des prises d’escalade
Dans l’ensemble, ces mécaniques de base pour la grimpette s’intègrent rapidement, et en quelques minutes, on maîtrisera la progression du personnage le long de la paroi. Reste que la montagne est traitre et réserve son lot de dangers. Ainsi, on doit par moments planter des pitons pour assurer notre sécurité, notamment pour éviter de retomber trop bas en cas de chute, une mesure cruciale que tout alpiniste validera.
De plus, les prises offertes par l’environnement ne sont pas toujours un long fleuve tranquille. Parfois, il faudra sauter, se balancer dans le vide ou encore courir le long de la paroi pour progresser. Enfin, Ballast, la petite créature bleue qui se trouvait dans notre sac, pourra également interagir avec l’environnement. En activant son écho, notre amie communiquera avec les plantes ou les insectes, qui apporteront leur contribution à cette rocambolesque ascension. Toutes ces mécaniques de gameplay seront introduites progressivement au fur et à mesure de l’ascension, apportant un semblant de progression dans les possibilités de grimpe.
En réalité, notre montée ne représentera jamais de véritable casse-tête même avec cette petite progression des mécaniques. Elle sera avant tout question de dextérité manuelle et d’observation de l’environnement. En d’autres termes, Jusant sera plutôt simple à terminer. Peut-être un peu trop pour les amateurs de jeux de plateforme qui aiment se creuser les méninges. D’ailleurs, le jeu ne propose aucune phase de réflexion « terrestre ». Ne vous attendez pas, entre deux phases de grimpettes, à déambuler dans des salles à la recherche d’interrupteurs ouvrant des portes à droite à gauche, ni même à résoudre des énigmes capillotractées. De l’escalade, rien que de l’escalade. C’est ça la vraie expérience de la montagne.
En résumé, Jusant s’adresse aux joueurs désireux de vivre une aventure en montagne tout en restant confortablement installés dans leur canapé. Avec son scénario très épuré et une difficulté relativement modérée, il se présente comme une expérience immersive réussie. Cela est dû en grande partie à son gameplay bien conçu pour la manette et à une ambiance sonore qui oscille entre le poétique et le réaliste. De plus, le jeu évite aussi l’écueil de trainer en longueur, puisque la durée de vie de Jusant est d’environ 5-6h (un peu plus pour ceux qui souhaitent collecter tous les éléments disséminés sur la montagne). Une durée qui apparait donc comme parfaitement adapté étant donné que les mécaniques sont au final assez limitées. Si vous aimez les jeux où le voyage et l’aventure sont les propositions principales (voire uniques), vous trouverez votre compte avec ce dernier-né du studio DON’T NOD.
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