Bien qu’Harvest Moon continue d’exister en tant que licence (avec un nouvel opus qui sort ce mois-ci), rappelons que celle-ci a changé de mains il y a des années et que les véritables successeurs des premiers jeux de l’éditeur Marvelous/XSeed sont actuellement au nombre de deux : Rune Factory et Story of Seasons. Si le premier s’est offert un univers un peu plus typé anime/manga avec une aventure de type JRPG qui s’est greffée aux fondations de son aîné, le second est resté quant à lui dans la droite lignée du concept de base, à savoir un simulateur de vie à la ferme pur jus. Et c’est sa dernière itération en date, Pioneers of Olive Town, que nous allons mettre à l’épreuve dans ce test.
• Développeur / éditeur : Marvelous
• Support de test : Nintendo Switch
• Disponible sur : Nintendo Switch
• Version du jeu utilisée : version 1.0.3
« J’appuie sur le starter et voici que je quitte la terre »
Vous êtes un citadin ou une citadine qui, un beau jour, héritez de la ferme de votre grand-père. Prêt.e à plaquer la vie stressante de la ville afin d’élever des choux et planter des chèvres, vous enfourchez vaillamment votre fidèle scooter afin d’emménager à Oliville. Arrivé sur place pile au moment où votre monture tombe en rade, c’est un affable petit moustachu qui vous accueille sur place en se présentant en tant que maire du coin. Ainsi débutent vos aventures dans Story of Seasons: Pioneers of Olive Town (SoS PoOT pour les intimes).
D’entrée de jeu, SoS PoOT vous propose de customiser votre personnage, en vous proposant d’ailleurs un système de création assez complet. On note d’emblée, et c’est appréciable, que l’ensemble des éléments proposés n’est absolument pas classé par genre. Libre à vous, donc, de choisir coiffures, poses, tenues, ou encore formes de visage selon vos préférences et sans aucun label genré. Il n’y a qu’à la toute fin, cependant, que le maire vous demandera indirectement si vous êtes « le petit-fils ou la petite fille » du précédent propriétaire de la ferme. Notons dans la foulée que le jeu vous propose deux modes de difficulté : « normal » et « pousse », le second permettant d’avoir plus d’endurance et de gagner plus facilement de l’argent avec le fruit de vos récoltes – ce qui nous paraît être plus proche d’un mode équilibré que d’un mode facile, le mode normal proposant une progression tout simplement plus lente.
Assez rapidement, on découvre les lieux ainsi que les activités qui seront proposées tout au long du jeu. On est ainsi amené à naviguer régulièrement entre la ferme et Oliville, tout en essayant de débloquer certaines zones de la propriété (et les ressources que celles-ci renferment). Oliville, quant à elle, se présente comme un joli petit village d’inspiration méditerranéenne situé en bord de mer. On y trouve l’essentiel, à savoir des boutiques, un musée pour y stocker vos trouvailles, et quelques lieux d’intérêt divers et variés (mairie, bar, etc.). A noter, enfin, qu’il existe une petite fonction online vous permettant d’afficher votre personnage en tant que PNJ dans le village d’autres joueurs et inversement. Et d’enregistrer une de vos photos pour que celle-ci ait une chance d’apparaître dans les écrans de chargement.
Loin est le temps des pionniers
Au sein de la ferme, les activités bien connues des fans de Harvest Moon, Stardew Valley ou encore Rune Factory répondent à l’appel : en plus de votre maison qu’il est possible de peupler avec un ou des animaux de compagnie en plus son amélioration potentielle si vous avez suffisamment de matériaux, vous pouvez labourer les sols de votre propriété pour y récolter des légumes de saison, planter des arbres fruitiers, réparer puis exploiter des bâtiments hébergeant divers animaux, et couper/miner/désherber tout ce qui vous passe sous la main. Il est également possible de s’adonner à des activités rémunératrices annexes telles que l’élevage d’abeilles pour le miel ou encore la culture des champignons. Les points d’eau à proximité peuvent servir de lieux de pêche voire être asséchés pour révéler les trésors qui se cachent au fond, et les grottes avoisinantes offrent la possibilité de s’y aventurer plus ou moins profondément afin d’y dénicher métaux et pierres précieuses.
Au-delà de la culture et de la récolte de matériaux divers, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town propose aussi de crafter objets et machines. S’il est possible de créer certaines choses à la main via le menu associé (qui se révèle d’ailleurs assez peu agréable à l’utilisation car mélangeant toutes les catégories en une seule liste), il faudra en revanche monter des machines pour produire certains types de matériaux manufacturés. Et c’est là que le bât blesse : Story of Seasons: Pioneers of Olive Town ne cherche pas dans la finesse et propose un système de crafting qui se veut très basique et bien peu inspiré dans son exécution. Concrètement, chaque machine disponible en début/milieu de partie produit 1 élément raffiné en échange de 3 ou 5 ressources brutes après un temps de production qui augmente en fonction de la rareté des ingrédients.
Lorsque vient le moment de produire des dizaines de poutres ou de lingots pour améliorer sa maison ou ses outils, on se retrouve vite à devoir créer et poser sur le terrain des dizaines de machines encombrantes qui occupent chacune 4 carrés de terrain. Mise à part l’arrivée de machines à rendement amélioré un peu plus tard dans la partie (mais très onéreuses au moment d’arriver), rien ne vient faciliter la vie du joueur ou de la joueuse lorsque le besoin de matériaux devient fatidiquement industriel. L’ergonomie liée à l’usage de ces machines, à l’instar de celles concernant la récolte, n’a pas non plus été pensée pour rendre le jeu agréable en main. Là ou Stardew Valley avait eu la bonne idée de permettre le simple maintien d’un bouton en marchant pour décharger/recharger des dizaines de machines en un clin d’œil, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town oblige le joueur ou la joueuse à remplir et à vider chaque machine une par une… le processus devient vite désagréable si on prend en compte le caractère quotidien de ces manipulations. Sans compter que la place prise par toutes ces machines n’aide pas à s’immerger dans une ambiance de ferme, celles-ci occupant rapidement une superficie non-négligeable en extérieur. Des bâtiments dédiés à la production offrant de l’espace en intérieur pour les machines auraient été plus qu’appréciables.
Plus généralement, c’est bien au niveau de l’ergonomie et de la qualité de vie que Story of Seasons: Pioneers of Olive Town ne brille pas. Les étables et poulailler doivent être ouverts manuellement tous les matins, et les machines exploitant les ressources animalières ne peuvent pas être posées à l’intérieur… ce qui nous force, chaque matin, à ouvrir les portes, à rentrer pour récupérer les œufs en ce qui concerne le poulailler, avant de ressortir pour alimenter les machines aux défauts cités précédemment. Là ou l’excellent Stardew Valley, pour le citer à nouveau, permettait de laisser les portes ouvertes et de placer des machines à l’intérieur pour faciliter le processus de production à l’endroit de ramassage des matières premières. A ce sujet, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town nous fait l’effet d’un jeu légèrement daté, dans un marché où les autres jeux du même genre (dont Rune Factory, pourtant du même éditeur) ont su évoluer et moderniser leurs concepts.
Commerçants un peu trop gourmands
En-dehors de la ferme, le village est le deuxième gros centre d’intérêt d’un jeu de ce genre. C’est là, en effet, que se déroule tout l’aspect social avec les habitants et qui passe autant par de simples échanges journaliers que par des évènements annuels organisés par la mairie. Et Story of Seasons: Pioneers of Olive Town tape là encore à côté avec une galerie de personnages certes large mais assez terne dans l’ensemble. Qu’il s’agisse du chara-design souvent peu inspiré ou d’une écriture trop lisse, les villageois d’Oliville peinent à se graver dans nos mémoires et à nous motiver à les débusquer dans le but de développer des relations avec eux. Et les romances, hélas, souffrent par définition de ces défauts, avec des bachelors et des bachelorettes dont la plupart est bien trop effacée en matière de charisme. On se retrouve ainsi à n’aller en ville que par obligation – pour remplir le musée ou faire les boutiques, par exemple. Les évènements saisonniers, quant à eux, varient en intérêt, certains se résumant à des scénettes quand d’autres proposent de vrais mini-jeux sympathiques à prendre en main.
Les boutiques, d’ailleurs, ne sont pas exempts de défauts non plus. Si fournir des ressources en nombre au forgeron ou au charpentier du coin pour développer ses outils ou sa maison font partie du folklore de ce genre de jeu, il est assez étonnant de voir que Story of Seasons: Pioneers of Olive Town porte ce concept jusque dans l’achat de biens lambdas. Il vous faut carrément, par exemple, fournir le tissu en plus de l’argent nécessaire pour acheter de simples vêtements, idem avec des achats aussi anodins qu’une paire de lunettes dont la vendeuse vous demandera par exemple du bois ou de l’acier en plus du prix standard… Là encore, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town fait dans le poussif avec des choix de gameplay parfois trop lourds.
A cela s’ajoute une histoire bien trop effacée qui se contente du minimum syndical avec un recyclage de thèmes vus et revus (les traditionnels esprits réveillés par votre ferme qui se développe, notamment). Au bout d’une vingtaine d’heures, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town peine ainsi à retenir l’attention et à récompenser les joueurs et les joueuses en oubliant d’enrober les redondances quotidiennes avec une narration et des enjeux motivants.
Manque de finitions
D’un point de vue artistique, Story of Seasons: Pioneers of Olive Town se démarque de façon plutôt agréable autant sur le plan visuel que sonore. Visuellement, même si on a déjà critiqué le chara-design un peu trop lisse de la majorité des PNJ un peu plus haut dans cet article, le jeu n’a pas à rougir de la concurrence avec des animaux tout mignons et de jolis environnements qui réussissent à nous faire oublier que la Switch a parfois du mal à permettre de bonnes textures. Ajouté à une bande-son entraînante et adaptée, l’ensemble tient très bien la route et on accroche assez rapidement à la direction artistique.
Malheureusement, la technique derrière a tendance à pécher par moments, avec de grosses chutes de framerate (ndlr : images saccadées) constatées au niveau de la ferme lorsque les conditions météorologiques se dégradent ou que le nombre d’éléments à l’écran tend à augmenter au fil du développement de la ferme. A cela s’ajoutent des écrans de chargement parfois longuets entre la ferme et Oliville. Si visuellement, le jeu ne nous donne pas l’impression de pousser la console dans ses derniers retranchements, la réalité technique nous donne l’impression du contraire. Et nous avons même rencontré (bien qu’une seule fois en quelques dizaines d’heures) un bug de type « écran de chargement infini » qui nous a forcé à perdre une partie de notre progression.
Ajouté aux manques de finitions constatés au niveau de l’UI (ndlr : l’interface utilisateur) et du QoL (ndlr : « quality of life », ces petits détails d’ergonomie améliorant l’expérience de jeu), Story of Seasons: Pioneers of Olive Town peinera en ce qui nous concerne à marquer les esprits comme ont pu le faire d’autres jeux du même genre. Si les bases sont présentes, le jeu manque cruellement de petites attentions à l’égard des joueuses et des joueurs afin d’améliorer leur expérience de jeu. L’existence de lutins en jeu, par exemple, aurait pu permettre des systèmes de récolte automatique en milieu/fin de partie au lieu de forcer le joueur ou la joueuse à tout ramasser à la main quand les champs deviennent très vastes. Story of Seasons: Pioneers of Olive Town se prend également trop au sérieux avec une trame narrative bien trop banale dans l’ensemble. Les quelques moments où Story of Seasons: Pioneers of Olive Town s’essaie à l’humour tombent souvent à plat, et le manque de sympathie éprouvée pour les PNJ n’aident pas à renforcer le lien entre les joueurs et le jeu.
Story of Seasons: Pioneers of Olive Town n’est pas un jeu foncièrement mauvais, mais celui-ci peine à s’imposer dans le milieu des simulateurs de fermes à force de camper sur les acquis du genre. Là où Rune Factory a réussi à se développer une identité qui lui est propre et là où Stardew Valley & My Time At Portia s’illustrent par des PNJ attachants et de l’exploration développée, ce Story of Seasons paraît bien fade en comparaison. C’est dommage, on ne demande qu’à aimer ce jeu qui nous propose une DA soignée ainsi que les bases du genre. Mais l’ergonomie sacrifiée, le manque de bonnes idées ainsi que le manque d’intérêt proposé par les PNJ et les environnements sapent un jeu dont le genre – répétitif par nature – a justement besoin d’une certaine dose de magie pour demeurer motivant et fun du début à la fin.
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