[Chromics n°1] L’adaptation, un processus créatif en question

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Remakes et adaptations sont aussi vieux que le cinéma lui-même et ne sont en aucun cas un fait nouveau. La multiplication des œuvres donne pourtant cette impression.

A chaque portage ou reportage à l’écran, le Net entre en ébullition. Posons-nous cette simple mais ô complexe question : c’est quoi votre problème avec les adaptations, les gens ? Car oui, pour une fois, intéressons-nous à vous (nous) plutôt que de critiquer (dans le sens littéral, apporter une critique, un avis construit) l’industrie de l’entertainment et tentons d’apporter une modeste contribution à ce débat qui, écrivons le de suite, est sans fin.

Une fois cela écrit pourquoi continuer ? Pour apporter des éléments, espérons-le, constructifs.

Pourquoi est-ce un débat sans fin justement ?

Une adaptation est issue d’une œuvre précédemment lue, visionnée, dont chaque initié (comprendre chaque personne ayant connaissance de l’œuvre originelle) aura eu sa lecture, son ressenti, son appréhension, sa compréhension propre. Logique, donc, qu’en voyant un résultat retravaillé par un réalisateur, des acteurs, un monteur et des producteurs, celui-ci soit abondamment commenté et que le débat soit sans fin, chaque personne ayant sa sensibilité, son avis, ses attentes. Et oui, il était important de nommer ces différents intervenants tant le résultat final est dépendant de l’addition de leurs apports ou une soustraction (coucou Suicide Squad).

Mais justement, c’est ce qu’est une adaptation : le résultat d’une transposition d’une œuvre d’un genre artistique, dans un autre (livre, théâtre, série, film). Cette transposition permet normalement d’ancrer le récit dans un univers plus proche de nous, ou plus cohérent, ou contemporain, en adaptant les thèmes abordés à nos préoccupations actuelles, bref : en la dépoussiérant, en la modernisant, et bien évidemment en l’adaptant au format !

C’est ce qu’ont su faire Disney et Marvel avec tous leurs films de super-héros, ainsi que Christopher Nolan avec sa trilogie Dark Knight (le premier étant un modèle du genre de modernisation). Dans ce genre cinématographique, tous ceux n’arrivant pas à s’écarter assez du matériau de départ se cassent les dents (coucou les Spider-men de Sony). Alors oui, soyons de bonne foi, l’adaptation ratée n’est pas seule coupable d’un film raté : acteurs aux fraises, montage à la serpe et effets spéciaux ayant 20 ans de retard sont autant de complices – voire coupables – possibles.

D’ailleurs …

Mauvaise adaptation = Mauvais film ?

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Parlons de Blade Runner, celui de 1982, car il est l’exemple parfait d’une adaptation ratée selon les critères classiques, mais qui deviendra un film culte pour les amateurs de SF. Alors certes, l’honnêteté m’oblige de préciser que le film fut un échec commercial aux USA à sa sortie.

Ceci étant écrit, Blade Runner est l’adaptation du roman de Philip K. Dick : « Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? ». Je ne reviendrai pas sur le scénario juste sur certaines différences fondamentales entre l’œuvre et son adaptation. Dans le roman, le héros est un loser, ses collègues ne le tiennent pas en haute estime, pas plus que sa femme. Son mariage semble tenir plus par habitude que par un quelconque lien affectif. Les humains migrent sur Mars en raison d’une catastrophe nucléaire, et les animaux sont devenus tellement rares qu’en posséder un, même robotique, est une quasi obligation sociale. Ajoutons un trip mystique et l’empathie élevée au rang de religion pour donner encore plus de goût à la recette.

Dans le film, le héros est un flic ultra-compétent et solitaire, célibataire. Le statut des animaux est à deviner plus qu’évoqué, les humains ne migrent pas puisqu’il ne semble pas y avoir eu de catastrophe nucléaire.
Le chapitre du commissariat fantôme aurait pu être évoqué, mais s’agissant d’une scène plus que d’une différence structurelle, l’exemple n’était peut être pas des plus pertinents. Vous avouerez aisément que niveau respect du manuscrit… D’ailleurs on parle plus souvent d’une libre inspiration que d’adaptation. Véritable nuance ou mauvaise foi ?

Et pourtant le film est un des piliers de la SF au cinéma, il a ouvert la voie aux films de SF. Alors oui, un exemple peut être l’exception qui confirme la règle, mais la liste des adaptations reniées même par leur propre géniteur est longue (Shining, Vol au-dessus d’un nid de coucou, Forrest Gump, American Phycho …), et nous aurions pu prendre American Gods en exemple à décortiquer de la même manière.

Adapter la SF est une nécessité. La technologie, les thèmes abordés peuvent être passés, il convient de faire en sorte que l’adaptation ne soit pas dépassée à sa sortie.

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Le cas Superhéros

DC Comics, Marvel et autres ont une problématique spécifique à gérer par rapport aux adaptations « classiques ». Leurs œuvres ne s’étalent pas sur une nouvelle, un roman ou un cycle (Games of Thrones) mais sur une période de 50 ou 84 ans (Superman). avec une parution mensuelle – voire plusieurs – avec des apparitions dans d’autres séries, il est vitale de continuellement rafraichir le titre.

Les origines des personnages sont ainsi constamment revisitées, modernisées, et donc adaptées. Cela, de manière à faire plus réaliste, moins naïf, voire à ajouter des éléments (comme des personnages) qui serviront pour une intrigue à venir. Car comme vous le savez, les super héros ne vieillissent pas ou alors dans une série se déroulant dans une réalité alternative ou dans un futur qui, de toutes façons ne verra jamais le jour, c’est à dire qui ne remplacera jamais la série principale.

C’est ainsi que Ironman ayant vu sa création lors de la guerre du Vietnam (1955 – 1975), celui-ci se voit transposer au Moyen-Orient. Adapté fidèlement Ironman nous donnerait un Tony Stark de 87 ans à ce jour ou situerait l’action dans les années 60 comme TOUS LES SUPERHÉROS. Autant un film de superhéros dans notre passé peut être sympathique (X-Men Days of the Future Past), autant le public n’aurait peut être pas suivi une vingtaine de films (juste pour le MCU) en cette époque.

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Toujours motivé par un portage à la lettre ?

Prenez du recul

Avec ce que nous venons de, modestement, expliquer ou du moins contextualiser :

Oui la vision de l’équipe du film ne sera peut-être pas la vôtre car, heureusement, nous avons notre propre sensibilité, et deux connaisseurs et fans d’une œuvre pourront avoir un avis divergent. Mais prenez un peu de recul, tentez de comprendre ce qu’ils ont voulu faire, raconter, apporter.

Mais arrêtez de crier au scandale quand on vous propose un héros d’une origine ethnique différente. Sauf si elle n’est que gadget comme Idris Elba dans Thor. Arrêtez de crier au scandale quand le héros devient une femme comme l’ancien dans Docteur Strange ou plus récemment, Docteur Who. Sérieusement, qu’on puisse s’émouvoir ainsi de sa féminisation alors que (et là je me permet de paraphraser un twittos particulièrement bien inspiré) il s’agit à la base d’un extraterrestre qui meurt pour se re générer, endosser des corps différents et voyager dans une cabine téléphonique de police anglaise bien plus vaste à l’intérieur qui lui permet de plus de voyager dans le temps. Alors oui docteur Who n’est pas une adaptation mais chaque changement docteur tient du même processus.

Vous vous insurgez que la famille Storm puisse être multi-ethnique dans la dernière version des 4 Fantastiques, mais c’est une proposition de famille moderne. Insurgez-vous après avoir vu le film en question, et ainsi avoir vérifié si les éléments, vous déplaisant de prime abord, apportent quelque chose ou non que ce soit d’un point de vue de l’intrigue ou de la modernisation de l’œuvre et/ou de son message

Mais avant, respirez, prenez un peu de recul.

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