Polgara a longuement témoigné autour du sexisme et de la toxicité dans le jeu de société, mais aussi du mouvement Women In Boardgames, au cours de son passage chez Un Monde de jeux.
Cela fait quelques jours que le sujet du sexisme et de la toxicité dans le secteur ludique, surtout depuis l’article sur le blog de Polgara, fait l’actualité. Nous évoquions même l’ouverture d’une plateforme pour accueillir tous les témoignages possibles, et servir de soutien aux victimes de comportements sexistes dans le monde du jeu. C’est alors qu’est née une volonté de créer un mouvement Women In Boardgames, à l’instar de ce qui se fait dans le jeu vidéo avec Women in Games. D’ailleurs, on a vu beaucoup de solidarité de leur part sur les réseaux sociaux.
Par ailleurs, ce mouvement Women In Boardgames a engendré beaucoup de réactions et de questions. Pour y répondre et apporter plus de clarté à son action, Polgara a profité d’une tribune offerte par Martin dans son émission Un Monde de jeux. Voici ce qu’il fallait retenir.
Autour de la toxicité environnante :
On a constaté qu’il y avait des problèmes récurrents de sexisme et de toxicité tels que du harcèlement, de la drague très lourde et très insistante, des remarques infantilisantes. Par exemple, « t’es sûre que tu comprends les règles du jeu ? » systématiquement dits aux filles et rarement aux garçons. Toutes ces petites remarques et réflexions qui ne sont pas méchantes à la base… Le paternalisme est un sexisme gentil. On ferme tous les yeux sur ces dérives et ces comportements, pour ne pas « casser l’ambiance ». Des femmes vont subir ces comportements cumulés au quotidien, dans leur cadre professionnel. Cela devient alors du harcèlement.
Le secteur paraît très inclusif et bienveillant, mais le ressenti est tout autre pour les personnes racisées ou homosexuelles. Il existe un décalage entre le ressenti de la classe dominante (des hommes blancs hétérosexuels) et le ressenti de ceux qui ne le sont pas. Il n’y a pas de raison que le secteur ludique soit épargné par toutes les intolérances de la société (racisme, transphobie, etc.).
Sur la plateforme de soutien et le pourquoi du serveur non mixte :
L’idée est de donner un lieu d’écoute, on a donc choisi un serveur Discord. C’est un lieu d’écoute, de partage et de soutien, sans subir des jugements de valeur. Ce n’est pas un lieu où l’on recueille des témoignages en vue de faire des actions en justice. On veut aussi créer un cadre informel, une « place safe », car on ne peut aller sur ce Discord librement.
On est tout à fait conscientes que des tas d’hommes sont disposés à aider, mais la parole ne sera jamais la même (s’ils intégraient le canal). Le but est de soulager les personnes qui sont victimes de comportements sexistes. C’est un peu comme une histoire de vestiaire. On n’a pas envie d’être dans un vestiaire mixte. Les personnes qui viennent parler se mettent à nu moralement et mentalement comme on se déshabille dans un vestiaire. L’idée est de pouvoir parler si on le souhaite, il n’y a aucune obligation. Les témoignages sont anonymisés, on ne demande pas vraiment à donner de noms.
Sur l’organisation de Women in Boardgames :
On a prévu de se constituer WiB. On est en contact avec Women in Games. Elles nous ont proposé de nous aider. Elles ont un rôle plus large, pour le moment nous n’avons pas le même objectif, le nôtre est basé surtout sur le soutien.
Sur les responsables de comportements toxiques :
Rappelons-le aussi, les agresseurs en eux-mêmes ne nous intéressent pas. On n’est pas là pour juger les gens, on aimerait même que ceux qui se sont mal comportés réfléchissent à ce qu’ils ont fait, et tendent vers une remise en question. On a une responsabilité collective. C’est un sujet systémique, pas un sujet des individus. Le système dans lequel on vit invisibilise toutes les petites agressions graves ou moins graves, et sexistes.
Il n’est pas question de lancer une chasse à l’homme. Il y a eu un cas qui est remonté particulièrement et qui a été déclencheur de notre mobilisation. Mais on ne voudrait pas que ce soit l’arbre qui cache la forêt. Le problème est beaucoup plus profond, c’est une somme de plein de comportements. On nous a sollicitées énormément en privé pour avoir le nom, pour ne pas être confronté à cette personne. Nous n’avons jamais ni confirmé ni infirmé les noms donnés. On a toujours refusé de dévoiler ce nom. Si ce nom est autant revenu…, c’est qu’à peu près tout le monde savait qu’il y avait potentiellement quelque chose, dont des faits qui ne datent pas des six derniers mois. C’est l’illustration même où tout le monde ferme les yeux. Si on avait agi plus tôt, on aurait pu prévenir d’autres comportements.
Mais on ne veut pas d’un tribunal populaire qui rend justice. On n’a pas ce rôle. On veut garder notre énergie pour aider les personnes qui se sentent victimes à se sentir mieux en s’exprimant, donc en se sentant soutenues.
Les retours suite à la mobilisation des Women In Boardgames :
On a discuté avec l’UEJ et la SAJ. On retient une énorme prise de conscience, une volonté de s’approprier le sujet et de le prendre au sérieux.
Une nouvelle fois, il est toujours possible de se documenter sur la démarche en lisant l’article publié sur le blog de Polgara, à cette page. On y trouve le formulaire et d’autres liens utiles.
Vous pouvez retrouver l’émission entière, et le témoignage complet de Polgara en replay, sur la chaîne Twitch d’Un Monde de jeux, ici.
Crédits de l’image à la Une : Dilok – stock.adobe.com
Diviser pour mieux régner…..